Carnet d'exploration de Portel des Corbières
Entre histoire imaginée et histoire écrite, une madone Septimanienne?
Ce qui est écrit et ce qui n'est pas dit
Al temps que l'Ante-Christ ravagèt ta Capèlo,
Qu'un pople ensouçient sapièt pas rebasti,
D'un geste de ta ma barrères lou cami,
A l'enemic damnat, a l'armado crudèlo.
Per tu forabandit a quitat la countrado,
Es pr'aco que, POURTEL t'a toujour tant aimado.
Mès un cop, el, passat,
Eres sans porto ni terrat.
Au temps où l’Antéchrist ravagea ta chapelle,
Qu’un peuple insouciant ne sut rebâtir,
D’un geste de ta main tu barras le chemin
A l’ennemi damné, à l’armée cruelle.
Par toi interdit, il a quitté la contrée,
C’est pour cela que Portel t’a toujours aimée,
Mais une fois lui passé
Tu demeures sans porte, ni toit.
Une introduction au doute & à la certitude
- Certain, Avéré (C): vrai. probabilité 100%
- Probable (Pr): Qui a une apparence de vérité; dont la vérité a plus de raisons d'être confirmée que d'être infirmée. probabilité: 85%
- Possible (Po): Qui peut être, exister, se produire; faisable. probabilité 50%
- Improbable (IPr): Qui a peu de chance de se produire. probabilité 25%
- Impossible (IPo): Qui ne peut être ou ne peut se produire; dont l'existence est exclue. probabilité 0%
L'indice mesure le degré de certitude. Il répond à la question: le fait décrit dans le document se rapporte-t-il à Sainte-Marie des Oubiels?
Un fervent passionné sans qui ce carnet n'aurait jamais existé
La Sainte-Marie des Oubiels du chanoine Emile, Calixte Barthe
(28 Juin 1865– 1 décembre 1928, Portel)En 1912, puis en 1916, le chanoine Emile Barthe, enfant de Portel des Corbières, alors vicaire de La Rochelle, publie deux livres consacrés selon son expression "à la première madone honorée dans l'église de Narbonne dès le VIIIe siècle, Sainte-Marie des Oubiels". Il etait prévu un autre tome qui ne sera jamais finalisé excepté deux brochures sur le monastère de Sainte-Eugénie et les seigneurs de Portel, publiées après sa mort.
L'expression d'Emile Barthe, "une madone Septimanienne", fait expressément référence au temps ou la province de Narbonne était un royaume wisigoth (V-VIIIe s.) pour ancrer dans cette période le début du culte marial des Oubiels.
Reinadouïro, la Reine des Eaux
Prenant comme point de départ, le lieu-dit Reinadouïro (Reine des Eaux/du Gué) et plus précisément "lou roc dé la Reinadouïro", situé à quelques centaines de mètres de Sainte-Marie des Oubiels, le chanoine Emile Barthe développe une histoire locale autour du culte de la Vierge Marie dans la Septimanie. Il attribue l'émergence de ce nom à l'époque gallo-romaine soit avant le VIIIe sur la base de l'analyse du mot regina doria et de l'usage de dérivés dans cette période, mais aucun texte ne fait référence à cette toponymie au Moyen-Âge, ce qui suggère une origine donc beaucoup plus récente.
La Berre franchit aux Oubiels un massif de rochers qui forme avec Tamaroque, deux bouts opposés de la vallée. Sur la rive gauche, la falaise se termine par un gros bloc, qui se nomme depuis des temps immémoriaux, lou Roc dé la Reinadouïro. Emile Barthe, Sainte-Marie des Oubiels, 1916
A l'origine du nom
- Oubiels: du latin ovile, ovilis signifiant bercail, lieu ou l'on parque les troupeaux errants dans la campagne, extension bergerie, cité en 990
Au cours des siècles, différentes graphies sont observées: Ouviels, Oviels, Ovials, Ovielz, Ouvielz
L'histoire d'un lieu sacré entre faits avérés, légendes et hypothèses
Sur les traces écrites du passé pour tenter de reconstituer l'histoire de Sainte-Marie des Oubiels
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Les périodes préromane et romane VIII X XI XII 737 962 963 990 1080 1141 1175
VIIIe 737 | La bataille de la Berre IPr LÉGENDE | la fondation d'un culte
Après la victoire de Charles Martel en 737 sur les Sarrasins, un sanctuaire votif dédié à la Vierge Marie, fut élevé sur les bords de la Berre, au terroir des Oubiels.
Le manque de référence ou d'écrit, a laissé la place à un ensemble de légendes, censées réécrire l'histoire de l'église Sainte-Marie des Oubiels. Sur une certaine base d'évènements historiques, on retrouve toujours des faits invérifiables, l'exaltation d'un récit qui se doit extraordinaire, en prenant une certaine liberté avec la chronologie et conduisant à une approximation voire une exagération. C'est souvent "cette histoire" qui est rapportée et véhiculée à l'infini.
Rien ne permet de confirmer qu'un sanctuaire ait pu exister à cet endroit au VIIIe siècle. -
Xe 962 | alaudes de Ovilis
Testament de Richilde de Barcelone (Narbonne)Pr Archevêque: Aymeric
Matfred, vicomte de Narbonne, fils de Richilde
Le 13 mai 962 au tribunal de Narbonne, comparaissaient les exécuteurs testamentaires de la vicomtesse Richilde (Riquilda de Barcelona) de Narbonne, fille de Guifred II Borrel (Wifredo II Borrell), comte de Barcelone et femme d'Odon (Eudes), vicomte de Narbonne. Cinq personnes apparaissent à ce titre:
- Aymeric, Archevêque de Narbonne,
- Arnulf, évêque de Gérone,
- la fille de Richilde, la comtesse Garsinda de Toulouse et
- le fils de la défunte, le vicomte Matfred et sa femme Adelaïde.
Parmi les biens énoncés, il est fait référence à l'alleu des Oubiels (alaudes de Ovilis) sans précision de localisation ou de confronts qu'elle souhaite dédier aux Saints Cosmes et Damien.
… Ipse alaudes de Ovilis iussit donare Sanctorum Cosme et Damiani; ecclesia quam illa edificavit concessit ad Nantigis presbitero, cum ipso alaude, et serviat ibi Deo quandiu vixerit, post obitum suum teneant eum omnes sacerdotes ipsius aecclesia sine iussione episcopali et de omnibus aliis hominibus, sed pro benefitio Sanctorum Cosme et Damiani. … CC Volume 5, 349. (Bd. 1, S. 315) testament de Richilde, 13 Mai 962
Cet alleu des Oubiels, elle a ordonné de le donner aux saints Cosme et Damien
Cette église qu'elle a édifiée, elle l'a concédée au prêtre Nantigis avec cet alleu, et qu'il y serve Dieu tant qu'il vivra.
Après sa mort, que les prêtres de cette église le tiennent, sans [attendre d'] ordre de l'évêque ni de tous les autres hommes, mais pour le bénéfice des Saint Cosme et Saint Damien.Saints Cosme et Damien: Les saints guérisseurs, respectivement patron des chirurgiens et des pharmaciens. décédés en 303 sous Dioclétien. Honoré par le pape Félix IV (527) par la construction de la basilique Santi Cosma e Damiano à Rome.① Il s'agit bien du territoire des Oubiels de Portel obtenu par héritage, en croisant avec les données du testament d'Adelaïde de 990.
② Il est fait référence à une église édifiée au cours du Xe siècle par Richilde, alors vicomtesse de Narbonne. Il est très probable que l'église ait été construite sur cet alleu. Dans ce cas, ce serait donc l'église romane qui a précédée l'église gothique.
③ L'exécution n'a certainement pas pu être effectuée car il n'y a pas eu d'utilisation ou de référence ultérieures au vocable Saint Cosme et Saint Damien sur ce territoire. Ceci peut éclairer la situation des Oubiels (absence et présence) dans les textes des deux testaments d'Adelaïde (977 et 990).
④ Le culte marial aux Oubiels est-il donc postérieur? C'est du domaine du possible, l'utilisation du vocable dans les écrits n'apparaissant qu'au XIe siècle, cela tendrait à aller dans ce sens. Mais ceci ne remet pas en cause la possible existence de la chapelle primitive. -
Xe 963 | Sancta Maria
La donation de Jean de FontjoncouseIPo Archevêque: Aymeric
Matfred, vicomte de Narbonne, fils de Richilde
Dans l'acte de donation du 15 mai 963, Jean de Fontcoujouse et Ode sa femme, donnent à l'archevêque de Narbonne, Aymeric, l'alleu qu'ils possèdent à Fontjoncouse, avec les trois églises qui en dépendent, ainsi qu'une vigne et un jardin situés au Pourtel (lieu-dit près de Fontjoncouse), et tout ce qui leur appartient à Sigean, sous la réserve de l'usufruit leur vie durant.
et ex ipso alode investura teneat ipsa ecclesia dimidiam de vinea quae vinea est in ipso loco quem vocant Portellum et ortum unum quem tenet Blandricus
Cartulaire de la seigneurie de Fontjoncouse
Dans ce même acte, il exclut de la dotation à l'archevêque de Narbonne une manse située dans l'alleu de Fontjoncouse, qui appartenait autrefois à certain Radulfe (Radulphe) et qui est maintenant à Sainte-Marie.
… quantum infra istas quatuor affrontationes includunt de praenominato alode, sic damus atque cedimus praefatae ecclesiae, excepto uno manso, qui fuit quondam Radulfi, et nunc est Sanctae Mariae Cartulaire de la seigneurie de Fontjoncouse
Confronts de l'alleu de Fontjoncouse
Côté Autan, le confront est "in terminio de villam quæ vocant Caturcina", villa Caturcin/Cadorque.
Ce territoire est décrit comme se trouvant entre le château de Durban, le pech de Montveyre, le terroir de Fontjoncouse et celui de Salavert
1267 cartulaire de Fontjoncouse① Cette phrase ne peut pas se rapporter au terroir des Oubiels ou à celui de Gléon, deux terroirs pouvant se referrer à Sainte-marie, mais qui sont tous deux hors de l'alleu de Fontjoncouse.
② L'affirmation serait en contradiction avec le testament de Richilde.
③ La dénomination Sancta Maria fait référence au monastère bénédictin de Santa Maria de Ripoll dans le comté d'Osona, province de Gérone, fondé en 888, et dont l'un des abbés était Radulf, fils de Guifred le Velu, Comte de Barcelone. Ceci implique que la transaction s'est effectuée dans la période où Radulf était à Ripoll, soit avant 914. -
Xe 990 | villa Ovilis
Le domaine agricole des OubielsC Archevêque: Ermengaud de Narbonne
Raymond Ier, vicomte de Narbonne
La villa Ovilis: villa carolingienne
C'est un domaine rural, possession du Vicomte de Narbonne, et situé sur des terres propices à la culture. A ce domaine sont rattachées des manses qui lui sont dépendantes.
Ad nurum meam Ricardem, dono omnem alodem, quem acquisivi in villa Botrexi, & in villa Fictorio similiter, & in villa Trolias ipsum alodem, quem comparavi de Pontioni, & in villa Ovilis campum unum, qui est ad ipso Genestare. Testamentum Adelaidis, vicecomitiffae Narbonenfis | 29 mars 990
Il est fait mention d'un domaine agricole au Xe s. (29 mars 990) dans le second testament de la vicomtesse de Narbonne, Adélaïde à sa bru Richarde qui lègue un champ appartenant à la villa Ovilis "ad ipso Genestare".
Ce tènement des Oubiels (villa Ovilis) se trouve en rive gauche de la Berre.
Il est limité au sud par la terre du Ginestas, près du ruisseau du même nom, affluent de la Berre (rive droite), qui forme la frontière méridionale du territoire de Portel avec celui de Roquefort des Corbières et dont la limite nord s'étend aux pieds du domaine de Lastours.
① Des traces de structure sont encore visibles sur les photographies aériennes corroborées par les vestiges de l'ancien domaine gallo-romain trouvés aux abords immédiats de l'église. ② Il n'est pas fait référence à Sainte-Marie dans cette acte, ni à une église, mais cela n'exclut pas l'existence d'une chapelle attachée au domaine à cette période.
③ Une dénomination identique (alaudes de Ovilis - Villa Ovilis) utilisée par Richilde et Adélaïde sa bru, tend à confirmer qu'il s'agit bien là du même territoire.
④ Ce domaine n'était pas présent dans le premier testament d'Adelaïde de 977. Cet ajout est peut-être du au fait qu'en 990, l'archevêque de Narbonne est Ermengaud de Narbonne, fils d'Adelaïde. Dans la mesure où les conditions sur cet alleu cité dans le testament de Richilde n'ont pas été remplies, l'alleu de ovilis était de nouveau disponible. -
XIe 1080 | Sancta Maria de Ovilis
L'église romanePr Archevêque: Pierre Bérenger de Narbonne
Adhemar, Seigneur de Durban et Portel
Arnaud de Portel, Chatelain de Portel
Actes concernants la dîme du sel et des poissons
Lors de l'assemblée génerale du 7 mai 1080, mention de l'existence d'une église ou d'une dévotion à Sainte Marie dans une donation:Pierre, archevêque élu, ses neveux: Aymeri, Hugues et Bérenger, avec l’assentiment de tout le peuple donnent au chapitre de Saint-Just, la dîme de tout le sel et de tous les poissons depuis Coursan jusqu'à Sijean, excepté pendant la période de temps où ces pêcheurs ont coutume de donner la dîme à Sainte Marie des Oubiels.
Ms 270: Copie en 1668 d'une partie des actes DOAT 55 f 113 © Médiathèque du Grand Narbonne
Ms 319: Inventaire Ducarouge 1680 f°180v © Médiathèque du Grand NarbonneEt habeant clerici et canonici sanctorum Justi et Pastoris omne decimum omnium piscium quos ceperint homines universi qui habitant Salas et Gruisanum, et universi qui manent in insula Licci et quos ceperint illi omnes qui morantur apud Periac et qui habitant Sejan et qui manent Lac castrum, excepto illo tempore quo soliti sunt dare decimum Sanctae Mariae de Ovilis … DOAT 55 f. 115
① Cet acte confirme qu'au terroir des Oubiels, une église existait au XIe s. puisqu'elle était la destination d'un voeu et cela avant 1080.
② A quelle date, ce voeu peut-il avoir été fait?
Etang Deume
(IXe →XVIIIe)
Nom venant de la proximité de la dixième borne milliaire de la voie romaine (Ad decimum lapidem)
Stagnum quod dicitur Decimus, 844
Ad stagnum Decimum, 1235
Étang d'Eume, 1763
Étang de Deume, 1781Le chanoine Emile Barthe fait remonter ce voeu aux années 800-850 parce qu'il avait cru discerner dans le nom de l'étang de Deume près de Sigean, la référence à la dîme du poisson (du latin decima).
Plus vraisembable, l’étang du Deume aurait un rapport avec la désignation du decimus, soit le dixième mille de la Via Domitia depuis Narbonne.Le voeu ne peut donc remonter au mieux qu'au Xe.
③ On remarquera cependant, que dans la donation de 1048 relative à la dîme des poissons, faite à la cathédrale de Narbonne par l'archevêque Guifred & le vicomte Bérenger, il n'est pas fait mention de Sainte-Marie des Oubiels.L'existence de cette église n'est pas contestée, ce qui est conforté par les pierres sculptées d'entrelacs et de palmettes utilisées en réemplois visibles dans les ruines de Sainte-Marie des Oubiels.
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XIIe 1141 | Ad Sanctam Mariam de Ovili C Archevêque: Arnaud de Lévézou
Guillaume de Durban, Seigneur de Portel
Dans l'église Sainte Marie des Oubiels est signée une transaction le 14 mars 1141 entre, Françoise, veuve de Raymond de Jonquières, et Arnaud, son fils, d’une part; Guillaume de Montpézat, Roland, son frère, Bertrand de Fontjoncouse et ses frères d'autre part; au sujet du decimane du Ginestas.
In nomine Domini. Manifestum sit quod ego Francisca femina et filius meus Arnaldus et nostri amici habuimus placitum cum Guillelmo de Montepesado et fratre suo Rolando et cum Bertrando de Fontejuncoso et fratribus suis ad Sanctam Mariam de Ovili in potestate Guilelmi de Durbano et archidiaconi Pontii Stephani et aliis probis hominibus illius terre quos Guillelmus de Durbano ibi in placito posuit. Archives communales de Narbonne
- On retrouve dans cet acte le territoire du Ginestare évoqué dans le testament d'Adelaïde de 990.
Il sera aussi mentionné sous le nom in terminio de Genestars, dans un acte de 1298 "Hommage de Torrela et Bedos Rosces pour le château de Montpezat et le domaine du Ginestas au vicomte de Narbonne, Amaury II"de Genestars, quod terminium est in viam qua itur de Narbona apud Perpinianum quod terminale est in juridcitione et districtu de Montepesato. DOAT 45 f°293
- De même, on retrouvera Arnaud de Jonquières dans une donation de terres dans le territoire des Oubiels au prieuré de Sainte-Eugénie en mai 1175.
① il est bien fait mention dans cet acte de l'église/chapelle Sainte-Marie des Oubiels.
② La présence de Pierre, chapelain de Sainte-Marie des Oubiels, laquelle, dit-il, est au pouvoir de Guillaume de Durban et de Pons Estève (ou Etienne), archidiacre de Narbonne.
③ Le terme chapellain capellanus designe un prêtre qui possédait la capellania, autrement dit la desservance d'une église paroissiale, ce qui implique qu'à cette date, Sainte-Marie des Oubiels était déjà considérée comme église paroissiale.
④ Pons Estève représente les droits de l’archevêque de Narbonne sur Sainte-Marie des Oubiels, ce qui induit une participation antérieure à la fondation, l'édification ou la dotation de Sainte-Marie des Oubiels au même titre que la famille de Durban. - On retrouve dans cet acte le territoire du Ginestare évoqué dans le testament d'Adelaïde de 990.
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XIIe 1175-1176 | Ste Marie d'Ouiels
Les acquisitions du monastère Sainte Eugénie
(et par là même possessions de l'abbaye de Fontfroide)Archevêque: Pons d'Arsac
Bernard de Durban, Seigneur de Portel
Dans le dernier quart du XIIe s., mention de l'existence certaine d'une dévotion à Sainte Marie lors de la donation au monastère de Sainte Eugénie.
- Monastère Sainte Eugénie
Bal daï jouns (Val des joncs) Dans la Notitia de servitio monasteriorum, liste de monastères devant suivre la règle de Saint Benoit et établie sous le règne de Louis le Pieux vers 819, il est fait mention dans la troisième catégorie, d'un monastère en Septimanie appelé "Monasterium Sanctæ Eugeniæ". Aucun autre écrit ne vient confirmer aux Xe et XIe siècles qu'il s'agit bien là du même monastère et d'autres questions telles qu'un ajout postérieur, restent sans réponse à ce jour.
Confronts de Als Agals
- Agal: aigal, cours d'eau, ruisseau
L'Agal est le nom d'un terroir jouxtant le chemin des charbonniers (Ad viam novam Mercadariam 1157).
Douze kalendes mars 1175 (17 fėvrier 1175), Arnaud de Portels donne à Ste Eugénie une condamine allodiale, terroir d'Ouiels lieu-dit "als Agals" confrontant d'auta et d'aquilon avec l'honneur Bernard de Durban, de midy avec la terre de Raymond Pierre et d'aquilon avec le grand chemin. H211 | AD11
Cet honneur de Bernard de Durban fera l'objet d'une donation en mars.
En mars 1175, Bernard de Durban et Rayne sa femme donne au monastère de Sainte Eugénie tout l'honneur qu'ils avaient terroir Ste Marie d'Ouiels. H211 | AD11
L'étendue du terroir des Ouviels au XIIe siècle
Les transactions passées nous donnent une idée de l'étendue du terroir Sainte-Marie des Ouviels (terroir d'Oviels ou de Sainte-Marie d'Oviels) à travers les indications de lieux-dits et les confronts. Les lieux-dits cités sont Bodigue, als Agals, Cate, a las Fount, al clos de las Tours, als horts de l'Église.
- Monastère Sainte Eugénie
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La période gothique XIII XIV XV XVII 1255 Fin XIII 1293 1309 1360 1404 1481 1602 1644 XIIIe 1255-1285 | Ste Marie d'Ouiels
L'hypothèse FontfroideIPr Jusqu'à la fin du XIIIe s., Fonfroide aura dépensé sans compter pour acheter des terres aux Oubiels et à Portel. Le chanoine Barthe avait émis l'hypothèse que:
Sainte-Marie des Oubiels eut pu être construite par l'abbaye de Fontfroide car le fief lui appartenait au XIIe siècle. Il indique que la juridiction domaniale dépendait de Fontfroide, tandis que la juridiction spirituelle était sous la patronage de l'archevêque de Narbonne.Ledit monastère en récompense de ce dessus donne au seigneur de Dones, qui était Gaubert de Durban, tout ce qu'il avait au lieu et terroir de Portel et en la dixmerie Ste-Marie d'Ouviels que si ledit Gaubert meurt sans enfants, ledit monastère rentrera dans la jouissance de ce qu'il lui donne.1285 H211 f°69 | © AD11
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XIIIe Fin XIIIe s. | Construction de l'église Qui a construit l'église Sainte-Marie des Oubiels? Archevêques: Pierre de Montbrun (1272-1286†)
& Gilles Aycelin de Montaigu (1287-1311)
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LÉGENDE | église Sainte Marie des Oubiels
En 1283, Charles II le Boiteux, roi de Sicile et neveu de Saint-Louis (Louis IX), fut fait prisonnier par les Aragonais au cours d'un combat naval. Il émit le voeu de faire élever trois églises à proximité du lieu de sa libération, ce qui se produisit en 1284 à une lieue de Narbonne, non loin de Prat-de-Cest. Il versa donc à l'archevêque de Narbonne, Pierre de Montbrun (1272-1286†), les deniers nécessaires à l'édification des églises des trois villages mitoyens de Portel, Peyriac-de-Mer et Sigean qui en étaient dépourvus.
La déconstruction de la légende
Charles II d'Anjou ne fut libéré de sa prison Barcelonnaise que le 8 novembre 1288 grâce au traité de Canfranc. Il ne peut donc pas avoir été libre, à Prat de Cest en 1284. Au jour de sa libération, l'archevêque de Narbonne n'était plus Pierre de Montbrun décédé en 1286, mais Gilles Aycelin de Montaigu.
On s'accorde à dire que la construction à proprement parler de l'église Sainte-Marie des Oubiels s'est effectuée vers la fin du XIIIe siècle et peut-être au début du XIVe siècle, sous l'exercice des archevêques Pierre de Montbrun et Gilles Aycelin de Montaigu. Dans tous les cas, elle dépendait de l'archevêque de Narbonne et du chapitre de la cathédrale.
La construction ou l'aménagement a pu continuer au XIVe siècle, comme en témoignent les éléments trouvés en 1912.
Pour l'église de Sigean, une autre légende existe, qui attribue la construction à Aymeri V.
LÉGENDE | église Saint Félix de Sigean
La construction de l'église Saint Félix de Sigean a été financée par Amaury, fils ainé du vicomte de Narbonne Amaury II (de 1298-1328†).
Mentionnée dans une charte de 1110, une église existait déjà à Sigean.
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XIIIe 1293 | église d'Oviels / als horts de l'Église Archevêque: Gilles Aycelin de Montaigu (1287-1311)
À la fin du XIIIe s., le monastère de Sainte Eugénie n'est plus qu'une grange abbatiale de l'abbaye de Fontfroide. Au terroir des Oubiels, l'église est mentionnée en tant que telle ce qui peut laisser supposer qu'à cette date, la construction de la nouvelle église ait été réalisée.
Non. avril 1293, Pierre Montagnac reconnait au monastère (de Sainte Eugènie) un hort vers l'église d'Oviels, confrontant d'auta avec la rivière , de Cers avec le chemin, de midy avec Bernard Pages et d'Aquilon avec Raymond Ferrand, sous le quart de fruits H211 | AD11
- Le lieu-dit Als horts de l'église désigne les terrains situés sous le chemin, à l'est de las Passos et de l'église et en bordure de la Berre.
Non. avril 1293, Raymond Jean de Portel reconnait au monastère un hort als horts de l'Église confrontant d'auta avec la rivière, de midy avec le tènement de Raymond Cornet, de cers avec le cimetière, d'aquilon avec Pierre Folquet son frère; sous la cense d'un pagat huile. H211 | © AD11
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XIVe 1309 | Eclesia de Ovilibus Archevêque: Gilles Aycelin de Montaigu
Constitution d'une prébende dans la cathédrale de Narbonne: l'archevêque Gilles Aycelin de Montaigu prend les revenus mi-partie de l'église de Minerve, mi-partie de l'église des Oubiels.Fondation de deux nouvelles prébendes dans l'église Saint-Just, en faveur de Bertrand Mathei, prêtre, chanoine de Viviers, et Pons de Charenton, sous-diacre, recteur de Raulhac, au diocèse de Clermont.Et pro ipsarum prebendarum fundationes, dotem, juxta durum litterarum apostolicarum tenorem et formam, vobis ducentas libros bonorum turonensiun parvorum reddituum in ecclesia de Minerba et centum librarum ejusdem moneta redditualium in ecclesia de Ovilibus nostra Narbonensis diocesis … DOAT 56 f°156
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XIVe 1360 | Eclesia de Ovilibus Archevêque: Pierre de la Jugie
Item ecclesia de Ovilibus de frumento viginti unum sestarium imam quarteriam, unam ponderium et partem tertiam unius ponderiae
Item l’Eglise des Oubiels pour une rente de froment s’élevant à vingt-et-un sétiers, une quartière, une pugnière et un tiers de pugnière. Livre Vert contenant les droits et redevances de l’archevesché.
Archives Departementales de l'Aude, G2 f°26 (Copie faite en 1649) -
XVe 1404 | église parrochielle de Nostre Dame de Portel
Visite de J. CorsierArchevêque: François de Conziè
Portel: Item, au 197 feuillet (de l’original de 1404) est la visite de l’église parrochielle de Nostre Dame de Portel. La collation de laquelle appartient audit seigneur Archevesque.Il est indiqué que le recteur des Oubiels tient deux lampes allumées (en l'honneur de Dieu et de Marie).
Il est fait mention de la confrérie de Saint-Blaise que l'église possédait (comme à La Palme et Fabrezan)
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XVe 1481 | église de Notre-Dame de Portel Archevêque: Renaud de Bourbon
Acte d'achat, donné par noble Pierre de Donos, seigneur de Donos, co-seigneur de Mathes et Portel son père, aux ouvriers de l'église de Notre-Dame de Portel, d'un pré sis au terme dudit Mathes, contenant trois setérées et demie, sous la censé et usage annuel de deux sols et demi à la Noël, en outre lesdits ouvriers sont tenus de faire dire dans l'église Saint-Etienne dudit Portel, tous les ans, trois messes, une haute et deux basses, pour les âmes de ceux pour lesquels ledit seigneur est obligé de faire prier, et seront encore tenus de payer audit seigneur pour le foriscape, à chaque renouvellement du recteur, deux livres quinze sols.
① Les deux églises de Portel sont mentionnés dans cet acte.
L'église Saint Etienne de Portel
Saint-Étienne: En occitan Estève, Saint Étienne est un prédicateur juif du Ier siècle considéré a posteriori comme le premier diacre (protodiacre) et le premier martyr (protomartyr) de la chrétienté. Sa notoriété se propage suite à l'invention de ces reliques en 415.
A Narbonne, on trouve sous la même vocable l'église extra-muros Saint-Étienne dans le faubourg Villeneuve supposée fondée au Ve siècle et mentionnée en 782.
On trouve aussi dans le Narbonnais, d'anciens prieurés à l'écart des habitations sous ce même vocable.Il existait au XII-XIIIe siècle, dans Portel intra muros une église romane sous le vocable de Saint-Etienne, située sur l'actuelle place de l'Horloge. On y trouvait des sépultures de la famille de Gibron, seigneurs de Portel au XVIIe siècle. Des travaux furent d'ailleurs entrepris pour agrandir cette église pendant cette période.
Le quatriesme jour de Aoust 1632 est decédée Françoyse de Gibron, fille de noble Jean de Gibron, premier consul de Narbonne, et a esté ensepvelie à l'église Saint-Estienne du présent lieu de portel. Acte civil, © Archives départementales de l'Aude
C'est à cet endroit que fut bâtie l'église paroissiale Notre-Dame de l'Assomption au début du XVIIIe.
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XVIIe 1603 | Eglise grande Archevêque: Louis de Vervins
Jean-André de Gibron, Seigneur de Portel
Au début du XVIIe siècle, l'église est désignée sous le nom d'église grande pour la comparaison avec l'eglise Saint Étienne plus petite qui avait été agrandie.Un champ derrière l'église grande contenant 2 sétérées de terre, confrontant de cers chemin et M. le Recteur; marin: Pierre Bruel et le cimetière; midi: Herm, et aquilo, le chemin. Compoix de Portel (73 C 397) Archives départementales de l'Aude
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XVIIe 1644 | Eglise vieille
Abandon de l'église Sainte-Marie des OubielsArchevêque: Claude de Rebé
André de Gibron, Seigneur de Portel
C'est au cours de l'année 1644, vraisemblablement après le mois d'août que l'église Sainte-Marie des Oubiels est abandonnée au profit de l'église du village dédiée à Saint-Etienne.
Dans l'état civil de l'année 1644, jusqu'au mois d'août au moins, le prêtre (recteur) de Portel, François Forest, désigne l'église sous l'intitulé "Eglise parrochielle du lieu de Portel" puis en novembre de cette même année " La vieille église de Portel"
1644: Le cimetière change de nom, signe de l'abandon de l'église
Le 13 août 1644, Jeanne Castan est ensevelie dans le cimetière de l'église Parrochielle du lieu de Portel.
le 20 novembre 1644, Jean Blanc est enseveli dans le cimetière de la Vieille église de Portel.
LÉGENDE | Destruction de l'église
Lors du conflit franco-espagnol (1635-1648), l'église a été détruite par les Espagnols lors de leurs incursions dans le territoire.
Aucun récit ne donne d'information sur les raisons exactes de cet abandon, mais contrairement à la légende on peut supposer qu'elle se soit tout simplement effondrée.
Après cette date, le recteur de l'église de Portel possède le titre de recteur d'Ouviels et Portel comme indiqué dans une sentence arbitrale du chapitre St-Just et St-Pasteur de Narbonne, le 22 juin 1677.
… en la faculté de prendre l’entière dixme du carneng du bétail de toutes les personnes qui résident à Mattes ou ailleurs ayans ou percevans fruids, reveneus et droitz dans le lieu et terroir de Mattes, tant en bled, vin et huille que carneng en quelque terroir que ledit bestial dépaisse, pourveu que les propriétaires d’icelluy reçoivent les sacremens dans l’église de Portel; faisant inhibitions et défences audit sieur recteur d’Ouviels et Portel de lui donner en la perception de ladite entière dixme aucun trouble ny empêchement … Contrats du Chapitre Saint-Just G48 f°12-20 © AD11
① Cette dénomination implique que vers fin 1644, c'est la nouvelle église intra-muros qui est utilisée dont la construction certainement de faible importance s'appuie sur l'église Saint-Etienne. Au plus tard à cette date, l'église neuve devient l'église paroissiale de Portel.
② La date exacte de la destruction de l'église des Oubiels nous est inconnue. Tout au moins peut on affirmer qu'elle s'est produite au plus tard en 1644.
③ Le 23 août 1659, Mgr François Fouquet, archevêque de Narbonne, visite la nouvelle église paroissiale Notre-Dame de Portel (Ecclesia Beata Maria de Portello) .
Dans les ordonnances de visite, il indique que:L'église est "bastie toutte de nouveau et pourvue de toutte sorte de meubles et ornemans fort riches"
Que "le cimetière sera entièrement fermé de Murailles et une grille faite à l'entrée dicelluy"
Et qu'il y a lieu d'agrandir la maison presbytérale jugée trop petite "la Maison Presbiterale se trouvant fort petite & peu commode pour le logement des recteurs" -
L'après Sainte-Marie des Oubiels
XVIIIe 1702 | Eglise neuve
Eglise Notre-Dame de l'Assomption (Assumptionis Beate Maria)Archevêque: Pierre de Bonzi, puis Charles Le Goux de La Berchère à partir de 1703
Joseph de Cathelan, Seigneur de Portel
La nouvelle église Notre-Dame de l'Assomption dite " Eglise neuve" est inaugurée vers 1702 et utilisait l'église Saint Etienne comme sacristie.
L'église était située sur la place actuelle de l'horloge. Le clocher et les fondations sont reconstruits en 1856 et l'église est agrandie en 1876. Elle est démolie en 1889 pour en faire une place publique.
De l'Aydouzès au cimetière aux oliviers
De nos jours, une partie de l'ancien cimetière de Sainte-Marie des Oubiels est occupé par des oliviers dont la plantation est postèrieure à 1828.
① L'Aydouzès | ② Le cimetière Sainte-Marie des Oubiels | ③ Cimetière de la Bade |
L' Aydouzès (Aïdouzè): une nécropole, un cimetière paléo-chrétien?
Le premier cimetière identifié se situait dans le coude de la Berre au lieu dit "Las Passe(o)s", (Les Passes, passage). il est mentionné du XIIe à la fin du XIIIe siècle, mais serait à l'origine un cimetière paléo-chrétien. La date de son abandon en faveur de celui de l'église Sainte-Marie des Oubiels n'est pas connue. Diverses raisons ont été évoquées sur cet abandon: une crue de la Berre qui aurait ravagée le cimetière, la disponibilité de l'église Sainte-Marie des Oubiels et de son cimetière.
Au XIIe (1175) et au XIIIe siècle (1293), un cimetière est cité en tant que confront dans des actes de donations et achat de jardins au prieuré Sainte-Eugénie.
Est-ce l'Aydouzès ou celui de Sainte-Marie des Oubiels? Il est légitime de se poser la question. La seconde proposition impliquerait qu'autour de l'église romane du Xe siècle, le cimetière existait déjà ce qui est probable.
DONATION AU PRIEURÉ SAINTE EUGÉNIE
Arnaud, fils de Raymond de Jonquières, donne au prieuré de Sainte-Eugénie ses hommes Pierre Adulf et Pierre de Roquefort et leurs enfants, habitants de Portel. Il lui cède aussi un jardin dans le territoire des Oubiels, jouxtant d'autan la rivière de Berre, au midi l'hort de l'église Sainte-Marie, de Cers le cimetière , d'aquilon l'hort du même Pierre Adulf, ainsi qu'un champ al portal et tous les biens que ces hommes tenaient de lui dans les territoires des Oubiels et de Portel.
1175, 17 mai
Au début du XXème siècle, avant la première guerre mondiale, on pouvait encore observer à 400 mètres du château et de Sainte Marie des Oubiels, sur le coude que fait La Berre au lieu-dit « Las Passos », un assez grand nombre de tombes, presque à fleur de terre, construites et couvertes avec des dalles de pierre et toutes orientées orient-occident. L’une d’entre elles fermée par une grande dalle était appelée "la Dalle du Roi"
Michel Duret, février 2020
On trouve que ce soit à Gléon ou à Sigean, la même légende rattachée à un cimetière d'origine paléo-chrétienne qui aurait aussi accueilli la sépulture du chef Umar ibn Ḫālid (Omar Ibn Chaled) tué par Charles Martel lors de la bataille de la Berre en 737.
Ce cimetière occupait primitivement le lit actuel de la rivière, car on trouvait, il y a quarante ans, (c'est à dire dans les années 1860) des sépultures sur les bords mêmes du coude de las Passos.
Emile Barthe, 1916
Le cimetière Sainte-Marie des Oubiels
Le cimetière de l'église Sainte-Marie des Oubiels a été utilisé jusqu'en 1828 soit bien après l'abandon de l'église en elle-même. Il a été successivement désigné dans les actes sous les noms suivants: cimetière Notre-Dame, cimetière Notre-Dame des Ouviels (jusqu'en 1644), cimetière de la vieille église ou cimetière de l'ancienne église (à partir de la fin 1644) et cimetière de l'église parrochielle de Portel (XVIII -XIX).
Le cimetière de la Bade
Le cimetière de l'église vieille est désaffecté le 2 février 1828, jour de la bénédiction du nouveau cimetière de la Bade.
Les indications du cadastre Napoléonien de 1818 nous confirment qu'aucun autre cimetière n'existait dans Portel avant cette date.
Sainte-Marie des Oubiels: Les éléments architecturaux de l'église
Plan général
L'église Sainte-Marie des Oubiels comportait une nef orientée (l’axe principal de symétrie suit la direction ouest-est) unique (un seul vaisseau) de quatre travées, la dernière pouvant être considérée comme un transept bordé de chapelles latérales et une abside pentagonale (à pans coupés).
L'abside
L'abside est pentagonale à l'extérieur et à l'intérieur.
Les branches d'ogives très fines de l'abside retombent sur des chapiteaux à feuillages.
La nef
Un arc triomphal brisé sépare la nef du choeur, surmonté par une ouverture aujourd'hui murée.
Les voûtes d'ogives des travées sont quadripartites et barlongues. Les ogives retombent sur des culots.
Des rosaces polylobées ajouraient l'abside, les chapelles latérales et le clocher.
Le clocher
Le clocher (tour rectangulaire) s'élève au sud de la dernière travée de la nef ou transept, sur la chapelle latérale sud, configuration relativement classique des églises à nef unique.
Les chapelles
Parmi les chapelles que comportait l'église Sainte-Marie des Oubiels, l'une était consacrée à Saint Blaise substituée vers 1630 par Saint Roch.
Saint Roch (Montpellier 1350-1378†), canonisé par Urbain VIII en 1629: saint protecteur et guérisseur de la peste.
Cette substitution de culte intervient dans un contexte très précis: le retour de la peste dans la région narbonnaise en 1629.
Le trantiesme aoust mil six cens trante a esté ensepvely dans l'église parrochielle de Portel et dans la chapelle de(Saint-Blaise à la sépulture des hoirs du sieur Barthelemy Montolies par moi soubsigné)Saint Roch, M. Charles Fourest habitant du Saint Sprit ayant reçu les sacrements de l'église, cuius anima requiescat in pace.
Archives de Portel 1630, 30 août
Les chapiteaux
Les chapiteaux sont ornés de feuilles d'acanthe, de vignes, de lierre et de peuplier.
Les marques: rainures et trous
Que ce soient des trous représentant une croix ou une figure géométrique ou de simples rainures, ces marques sont en rapport avec une superstition ou croyance liée au caractère sacré de l'église dont la poudre de pierre aurait héritée.
Les réemplois & les traces de constructions passées
Des décors d'entrelacs et de motifs végétaux stylisés (rinceaux) réemployés dans les murs de l'église sont issus de l'édifice antérieur (la chapelle romane: époque Capétienne) alors que d'autres pourraient se rapporter au haut Moyen-Âge (Époque Carolingienne).
Les clefs de voûte: l'Agnus Dei
- Agnus Dei et agneau pascal
- L’Agneau pascal est l’agneau consommé lors de la fête de la Pâque. L’Agneau de Dieu, ou Agnus Dei, est une représentation imagée du Christ sous les traits d’un agneau. Cette représentation du Christ en Agneau, est apparue au IVe siècle
- Les attributs systématiques de la représentation sont la croix de résurrection et le cercle dans lequel il s’inscrit.
L'Agnus Dei est représenté sur les deux seules clefs de voûte restantes, celle de l'abside est encore bien visible tandis que celle de la travée du transept est la plus abimée.
Clef de voûte de l'abside
Le corps est recouvert d'une toison bouclée, sa tête est retournée vers l'intérieur regardant la croix et l'étendard, le tout inscrit dans un cercle.
Une tête défigurée est visible dans l'espace opposé à la rencontre des nervures rayonnantes et consolidait les deux branches les plus ouvertes des arcs d'ogives.
Clef de voûte de la travée du transept
Très abimée, on distingue vaguement la forme de l'agneau.
Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, parce nobis Domine.
Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, exaudi nos Domine.
Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, miserere nobis
L' Agnus Dei et la Vierge à l'Enfant, une histoire Narbonnaise du culte marial
Les sceaux des Consuls de Narbonne
A Narbonne, les sceaux utilisés par les consuls (Cité et Bourg) au XIIIe siècle comportaient l'Agnus Dei dont la légende est "Agnus Dei qui tollis peccata mundi dona nobis pacem"
et la Vierge à l'Enfant dont la légende est "Sigillum pacis (civium) narbonensium ou sigillum pacis consulum civitatis … "
L'Oratoire de Pierre de Montbrun (Chapelle de Palais-Vieux des archevêques de Narbonne)
Dans la chapelle de la Madeleine (chapelle privée, dédiée à Marie Madeleine.) construite par Pierre de Montbrun (1273-1279), se trouve côté sud, un petit oratoire dont la voûte d'ogive présente une clé de voûte avec l'agneau de Dieu portant l'oriflamme et les armes de Pierre de Montbrun ainsi qu'une peinture de la Vierge à l'Enfant vénérée par des anges.
Gilles Aycelin de Montaigu
L'importance du culte marial est particulièrement marqué chez Gilles Aycelin de Montaigu puisqu'il institua entre autres le transfert du vocable Notre-Dame de Bethléem dans la chapelle d'axe (chapelle à la Vierge) de la cathédrale Saint-Just.
L'évolution générale au cours du dernier siècle
XXe | Vers 1900 | L'église |
XXe | Vers 1950 | L'église |
XXe | 1973 | Chantier de restauration |
Les lourds travaux de consolidation et de restauration en 1973
Photographe Jannie Long © Monuments Historiques
Des parties importantes de la voute sont tombées. La seconde travée n'était plus debout.
XXIe | 2022 | L'Église |
Les statues emmurées
Le mystère de l'emmurement
En mai 1909, on découvrit à Portel dans le dernier mur (mur ouest) en démolition d'une église desaffectée en 1889 (l'église Notre-Dame de l'Assomption), des sculptures gothiques mutilées parmi lesquelles trois statues de la Vierge. Emile Barthe, 1916
Si le mur cité par Emile Barthe correspond à un de ceux de l'église Neuve, la raison pour laquelle ces statues ainsi que d'autres objets provenant de l'église Sainte-Marie des Oubiels, ont été "cachés" n'est pas expliquée. Il n'est pas rare que des parties d'un ancien édifice soient utilisées en réemploi, ce qui reste exceptionnel dans ce cas c'est leur qualité des objets trouvés comme si on n'avait pas pu se résigner à les faire disparaitre complétement.
Nous n'avons aucune certitude sur la date à laquelle cette opération a pu s'effectuer, tout au moins peut-on remarquer que dans l'inventaire de 1662, il n'y ait pas fait mention.
Les Vierges méridionales: le style du Maître de Rieux et son influence
Dans le Narbonnais, trois statues de la Vierge à l'Enfant présentent des similitudes importantes:
① La Vierge à l’Enfant, dite N.-D. de Bethléem de la cathédrale de Narbonne
② La Vierge à l'Enfant de l'église Sainte-Marie des Oubiels à Portel
③ La Vierge à l'Enfant de l'église Saint-Martin à Fleury d'Aude.
Caractéristiques communes Posture hanchée,
Visage large,
Cheveux ondulés,
Présence éventuelle d'attributs (livre, colombe, …),
Tête et mains légèrement disproportionnées.
Elles sont marquées par le style de Rieux dont elles héritent, style que l'on peut découvrir sur la statue de la Vierge de l'Annonciation du Maître de Rieux (vers 1340) conservée au Musée Bonnat-Helleu.
La ressemblance est particulièrement marquée entre les Vierges de Portel et de Fleury ce qui pourrait présumer d'une même origine.
Si la Vierge d'albâtre de Narbonne est datée des années 1340, les deux autres sont postérieures, ce qui impliquerait pour la Vierge des Oubiels une présence dans l'église bien après la fin de la construction, soit pendant l'exercice de Pierre de La Jugie (1347-1375).
On peut supposer qu'elle était placée à l'extérieur, entourant le portail avec d'autres statues.
La Vierge à l'Enfant de Sainte-Marie des Oubiels
Les autres statues et objets trouvés
La plupart des objets trouvés ont été daté du XVe siècle.
Bas-relief (fragment) | N°X dans l'inventaire d'Émile Barthe
Scène de la Cruxifixion: soldats romains jouant aux dés la robe du Christ
Élément d'architecture (fragment)
Les statues
Évangéliste | N°VIII dans l'inventaire d'Émile Barthe
La main gauche tient un livre fermé par un sceau ce qui pourrait représenter l'apôtre Saint-Jean, le livre étant l'Évangile dont il est l'auteur.
Abbé mitré | N°IV dans l'inventaire d'Émile Barthe
Sur le socle, une inscription partielle Sant Ro, interprétée pour Robert de Molesme (v. 1029-1111), fondateur de l'abbaye de Citeaux et considéré comme cofondateur de l'ordre cistercien, pour marquer le rôle de l'abbaye de Fontfroide qui possédait la dîme des Oubeils (Transaction de 1285)
Apôtre | N°XII dans l'inventaire d'Émile Barthe (tête)
Évêque | N°VI dans l'inventaire d'Émile Barthe
Évêque | N°VII dans l'inventaire d'Émile Barthe
LE TRIPTYQUE DES CORBIÈRES