Du salin de Gruissan au grau de Vieille-Nouvelle | Etang de l'Ayrolle

Paysages de l'île de Saint-Martin, Gruissan

Caractères & Intérêts du site
Archéologie Culture Architecture Nature Géologie

Introduction

Au bout de l'île de Saint-Martin, l'étang de l'Ayrolle
Au bout de l'île de Saint-Martin, l'étang de l'Ayrolle
  • L'étang de l'Ayrolle
  • Etang de Gruissan, XVIe siècle
  • Estang de Layrolle, 1771

Tout au bout du salin de Gruissan, en bordure de l'étang de l'Ayrolle, cette promenade nous amène au dernier grau naturel et permanent de la Narbonnaise en traversant les partènements du salin de Gruissan, les marais et les traces de l'ancien grau au Moyen-Âge.

Quand l'étang de l'Ayrolle s'appelait étang de Gruissan
Plan d'une partie de la côte de la mer, depuis la Redoute de Montolieu jusqu'au cap de la Franqui (1776) © AD11 sous-série 1 Fi 1255 Plan d'une partie de la côte de la mer, depuis la Redoute de Montolieu jusqu'au cap de la Franqui (1776) © AD11 sous-série 1 Fi 1255
Votre navigateur ne supporte pas les fichiers au format svg Le système des étangs (pdf)
  • Toponymie des noms des étangs
  • Étang de l'Ayrolle
  • de l'occitan Aira qui signifie espace découvert
  • Étang de Carretals
  • Le toponyme Carretals vient de l'occitan carreta qui signifie charette. Autrefois, c'était un endroit ou les charettes pouvaient traverser.
  • Clot du Levant
  • Clot désigne un endroit ou les fonds sont les plus profonds
  • Étangs de la Plaine (Le Gassot)
  • Lou Gassot de Labesque: mot occitan désignant un petit étang d'eau salée sec en été
  • Étang du Grazel
  • Grazel vient de gradus qui signifie passage, ici l'étang du grau
  • Le Pas, le Pas des Goules
  • Pas signifie passage entre deux étangs, gué
  • Étang de la Gourgue
  • Gourgue signifie étang, lac

L'étang de l'Ayrolle et son grau est le résultat d'un système complexe d'étangs interconnectés qui au cours du temps ont ėvolués, se sont scindés, isolés ou ont disparus pour aboutir à la situation existante. Depuis le Lacus Rubressus à l'époque romaine, en passant par l'étang Salin, c'est une modification importante de ce secteur de Gruissan qui s'est étalée sur plusieurs siècles.

La période printanière est propice à la découverte de la flore des digues, tandis qu'à la fin de l'été, les inflorescences de sel s'invitent dans le vieux salin. Pour profiter des meilleures couleurs, privilégiez les levers ou couchers du soleil lorsque la lumière est rasante et donne du relief.

Carte

Situation © IGN
Situation © IGN

Localisation

Le site se situe dans la partie sud de l'île de Saint-Martin à quelques kilomètres de Gruissan (D232).

Stationnement

Parking: En bordure de l'étang à proximité de la station de pompage en ruine au l'Ouest du lieu appelée anciennement "pointe du Grazeillet"

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Tracé

  • Difficulté: facile
    Durée AR (parcours principal): 3h - Distance: 10km - Denivellé maximum: 2m
  • La promenade ne présente pas de difficulté particulière hormis la zone marécageuse qui peut devenir impraticable et glissante selon les conditions, amenant par la même à adapter le parcours.

La digue et les partènements

La digue entre l'étang de l'Ayrolle et le Salin de Gruissan
La digue entre l'étang de l'Ayrolle et le Salin de Gruissan

La digue sépare ici l'étang de l'Ayrolle (de Aira: espace découvert) des partènements du salin de Gruissan.

Il est fait mention en 1830 d'une vente de terrains comprenant des marais salants "La portion concernant des Salangs et joncasse (lieu dont la végétation est composée de joncs et de roseaux)" sans que l'on puisse affirmer l'existence d'une exploitation du sel.

Ceci n'exclue pas la possibilité d'une récolte aléatoire du sel dans les étangs de la Plaine (le Gassot) et de Gamarre, là ou il pouvait se former.
Les paysages "lunaires" du salin
Les paysages "lunaires" du salin

L'exploitation du sel sur l'île de Saint-Martin débute au XXe siècle, en 1910. Des digues sont construites pour protéger les partènements et le salin des coups de mer, les roches utilisées provenant des carrières toutes proches de Gamarre et Graniès.

C'est l'occasion de dėcouvrir un endroit multiformes ou tout tourne autour du sel: le vieux salin, les formes du sel et l'adaptation de la flore à la salinité des sols ou au contraire, ses efforts pour y échapper sans oublier une faune riche et variée qui trouvent dans les divers bassins de quoi se nourrir.

Les vestiges du vieux salin

Les canaux et les vestiges du vieux salin
Les canaux et les vestiges du vieux salin

Le long des canaux et des partènements subsistent, rongés par le sel, les vestiges des ouvrages du vieux salin; les ruines de la station de pompage, les martelières, les indicateurs de niveau d'eau, des ponts, coffrages et digues de cloisonnement entre les bassins.

Les digues de cloisonnement, les poches d'eau de couleur rose dues à une micro algue, la Dunaliella Salina, et les vestiges du vieux salin.
Les digues de cloisonnement, les poches d'eau de couleur rose dues à une micro algue, la Dunaliella Salina, et les vestiges du vieux salin.

Les manifestations naturelles du sel

Selon les saisons et les conditions, les manifestations du sel dans le vieux salin prennent des formes différentes.

L'écume
L'écume de sel
L'écume de sel

L'écume de sel se forme par vent fort (Cers principalement), lorsque les eaux saumâtres et les matières organiques qu'elles contiennent, sont mises en mouvement.

Les efflorescences
Le vieux salin et le sel
Le vieux salin et le sel
Le salant blanc
Le salant blanc
Le salant noir
Le salant noir

Sous l'action du soleil et du vent (donc particulièrement pendant la période estivale), des efflorescences de sel apparaissent naturellement dans les bassins. C'est le phénomène de salination du sol dit "de salan".

On distingue ainsi le salant blanc et le salant noir (salinisation caractérisée par une coloration foncée noire du sol due à la formation de carbonate de sodium).

Dans l'Egypte ancienne, le natron (sel double de carbonate et bicarbonate de sodium), issu des lacs salés, était, avec le bitume, utilisé pour la momification.
Les cendres de la Soude (Salsola soda) transformées, plante halophyle, contiennent jusqu'à 30 % de carbonate de sodium.
la cristallisation

Conséquence de l'évaporation de l'eau, lorsque la saumure vient à saturation, une première cristallisation très fine apparaît en surface et s'accroche aux pierres.

Les bassins craquelés
Sol craquelé du bassin
Sol craquelé du bassin
Sol craquelé du bassin: quand l'eau prend cette texture laiteuse
Sol craquelé du bassin: quand l'eau prend cette texture laiteuse

Lorsqu'un bassin s'asséche, l'argile qui couvre le fond se gonfle et se craquelle.

La flore

Statices sur la digue (août)
Statices sur la digue (août)

Paradis pour la végétation halophyle organisée en zones parallèles au rivage en suivant le gradient de salinité, on y trouve d'abord les salicornes, puis les obiones et enfin les statices.

La digue, de part son élévation, accueille d'autres espèces de plantes qui trouvent, à l'écart des sols salés, un terrain plus propice à leur développement.

Bugrane sans épines (avril) Bugrane sans épines (avril)
Criste marine (août) Criste-marine (août)
Clématite brulante (août) Clématite brulante (août)
Moutarde des champs (avril) Moutarde des champs (avril)
Pissenlit (avril) Pissenlit (avril)
Soude ligneuse (août) Soude ligneuse (août)
Ail rose (avril) Ail rose (avril)
Anthémis maritime (avril) Anthémis maritime (avril)
Chardon à petits capitules (avril) Chardon à petits capitules (avril)
Euphorbe characias (avril) Euphorbe characias (avril)
Euphorbe réveil matin  (avril) Euphorbe réveil matin (avril)
Mauve sylvestre (avril) Mauve sylvestre (avril)
Muscari négligé (avril) Muscari négligé (avril)
Reseda blanc (avril) Reseda blanc (avril)
Clématite brulante (juin) Clématite brulante (juin)
Salicorne (août) Salicorne (août)
Grand Statice (août) Grand Statice (août)

Les marais et les traces de l'ancienne position du grau

les traces de l'ancien grau 1986 photographie aérienne IR © IGN
les traces de l'ancien grau 1986 photographie aérienne IR © IGN

En quittant la digue, on arrive à la zone marécageuse.

Cette zone marécageuse correspond à la position qu'avait le grau de la Vieille-Nouvelle au Moyen-Âge. Au cours des siècles, le lido s'est engraissé en s'appuyant sur les contreforts de l'île de Saint-Martin. Le grau se déplacera par la suite vers le Sud et il ne reste de nos jours qu'un ensemble de bras (appelé grau du Rajol, lo rajòl ou rajolo, le courant de l'eau, le fil d'une source) plus ou moins comblés selon les saisons.

Les bras obstrués de l'ancien grau
Les bras obstrués de l'ancien grau (grau du Rajol)
Les fossés en partie recouvert par la végétation de Salicornes
Les fossés en partie recouvert par la végétation de Salicornes

C'est aussi dans cette partie du littoral, sur un léger promontoire, entouré de fossés, qu'a été observé les restes d'une habitation que certains ont datée du Moyen-Âge tardif (XIVe et XVe siècles), mais les traces sont rares ou absentes, suite à la construction des digues du salin au début du XXe siècle qui a profondément modifié la zone. De nos jours, il ne reste que ces fossés rectilignes bien observable sur les photographies aériennes.

La plage et le grau de Vieille-Nouvelle

Entre le salin de Saint-Lucie et le salin de Saint-Martin
Vue aérienne du Grau entre les deux salins en 1976 © IGN
Vue aérienne du Grau entre les deux salins en 1976 © IGN
Le grau de la Vieille-Nouvelle
Le grau de la Vieille-Nouvelle
Il y a plusieurs hypothèses sur l'origine des toponymes Vieille-Nouvelle et la Nouvelle qui viendraient de l'occitan, Nova Vela qui signifierait "nouez les voiles" ou bien nouvelle voile.
  • Grau
    du latin Gradus qui signifie passage,
  • Coupure naturelle ou artificielle qui maintient les eaux d'un étang en communication avec celles de la mer
  • Peut aussi désigner l'embouchure d'un fleuve: Grau de l'Aude (Grau de Vendres)

Dernier grau naturel et permanent de la Narbonnaise, le grau de la Vieille-Nouvelle constitue l'aboutissement de cette randonnée là ou les eaux de la mer et de l'étang de l'Ayrolle s'échangent et se mélangent dans un panaché de turquoises.

L'étang de l'Ayrolle depuis le grau de la Vieille-Nouvelle
L'étang de l'Ayrolle depuis le grau de la Vieille-Nouvelle
Grau de la Vieille-Nouvelle | Ma Clape..

Histoire du grau

  • Les dénominations du grau de la Vieille-Nouvelle au cours des siècles
  • En occitan: Lou Gra | lou Gra de l'Airòlo | lou Gra de la Bietho Noubèlo
  • Grau de Narbonne, 1215
  • Barcha o autras leins … passa lo Gra o denant lo Gra de Narbona, 1253
  • et invenerunt quod stagnum Gruyssano et agulha gradus Narbone, 1346
  • Ad introytum maris, ubi dicitur Gradus Narbone, 1352
  • Al terme del Grau de Narbona, 1537
  • Grau vieux de la Nouvelle, 1764
  • Grau de la Vieille Nouvelle, 1846

Il fut jadis une embouchure de l'Aude, appelée anciennement Grau de Narbonne car il constituait le point d'entrée vers le port de la ville. L'étang qui englobait l'île de Saint-Martin et Gruissan portait communément le nom d'étang de Gruissan avant de se scinder en plusieurs entités distinctes.
C'est le 28 février 1797 qu'eut lieu le terrible naufrage de trois bateaux de pêche Gruissanais au large du grau lors d'une tempête. A la suite de cette tragédie, un pélerinage à la Chapelle des Auzils fut organisé chaque lundi de Pâques.

Les métamorphoses du grau de la Vieille-Nouvelle

Un grau évolue et se modifie au cours du temps au gré des coups de mer et des ensablements, son tracé et sa position changent pouvant conduire jusqu'à son obturation si les courants sont insuffisants pour assurer un autodragage de la passe.


Les photographies aériennes du grau de la Vieille-Nouvelle depuis 1946 montrent les transformations et les déplacements du dernier grau naturel de la Narbonnaise.

➡︎ Les graus de la Narbonnaise | de l'étang de Vendres à l'étang de Lapalme

Le lac (le grand partènement)

Le Lac
Le Lac

Une diversité de bassins par leur taille, leur profondeur et leur salinité offre un environnement favorable à une faune variée.
Parmi ces bassins, le plus grand partènement du salin de Gruissan a pour nom "le Lac" et constitue une escale et un refuge pour les oiseaux.

Vol de flamants roses en approche sur le LacVol de flamants roses en approche sur le Lac Vol d'Avocettes au dessus du LacVol d'Avocettes au dessus du Lac Echasses blanchesEchasses blanches

La redoute de la Vieille-Nouvelle

Depuis l'entrée du grau, la redoute de la Vieille-Nouvelle (XVIII<sup>e</sup> siècle)
Depuis l'entrée du grau, la redoute de la Vieille-Nouvelle (XVIIIe siècle)

Depuis la rive, on observe les ruines de la redoute de la Vieille-Nouvelle (appelée aussi tour ou signal de la Vieille-Nouvelle) construite en 1742 sous la direction de l'ingénieur royal Jacques-Philippe Mareschal (1689-1778). C'est une tour à signaux, de 3 toises de côté comportant un étage et une plate-forme. Le foyer est placé au centre de celle-ci. Elle est située sur la commune de Port La-Nouvelle et controllait/surveillait l'accés au grau.

La redoute de la Vieille-Nouvelle (XVIII<sup>e</sup> siècle)
La redoute de la Vieille-Nouvelle (XVIIIe siècle)
Plan d'un tour pour servir aux signaux.  C 816-3 Languedoc : côtes. 1741 © Archives départementales de l'Hérault
Plan d'un tour pour servir aux signaux. C 816-3 Languedoc : côtes. 1741 © Archives départementales de l'Hérault

Pour en savoir plus

1. Olivier Weller Sel, eau et forêt : D'hier à aujourd'hui Editeur: Presses Universitaires de Franche-Comté (3 novembre 2008), Alain CHARTRAIN et Pierre-Arnaud de LABRIFFE p401-431. Vers une archéologie du sel en Languedoc-Roussillon (livre)
2. GRASG Les Salins de Gruissan
3. Mareschal, Jacques Philippe (1689-1778) Mémoire sur les places fortes du Languedoc, et sur les ouvrages publics de la même province qui sont portés sur les Etats de la Cour, 1752 © BNF
4. INRAP Archéologie du sel

Fiches descriptives (Tela Botanica)

1. Ail rose
2. AnthŽémis maritime
3. Bugrane sans Žépines
4. Criste-marine (Perce-Pierre)
5. Chardon ˆà petits capitules
6. ClŽématite brulante (ClŽématite odorante)
7. Euphorbe characias
8. Euphorbe rŽéveil matin (Herbe ˆ verrues)
9. Grand Statice
10. Mauve sylvestre (Grande Mauve)
11. Moutarde des champs (Ravenelle)
12. Muscari nŽégligŽé
13. Obione (Halimione faux-pourpier, Atriplex portulacoides)
14. Pissenlit (Dent-de-lion)
15. Reseda blanc
16. Salicorne
17. Soude ligneuse